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Place Tiananmen‏

Préambule du jour

Le 4 juin 1989, le régime chinois réprimait violemment un vaste mouvement démocratique sur la place Tiananmen à Pékin. Vingt ans plus tard, une centaine de Chinois, arrêtés au cours des manifestations croupissent toujours en prison et nombre de dissidents sont toujours exilés. Les autorités censurent toute information concernant cet épisode de l’histoire chinoise, si bien que les moins de 20 ans n’ont aucune connaissance du drame de 1989.

Citations du jour

Les apparences suffisent largement à faire un monde.
                                          Jean Anouilh


De même que je refuse d'être un esclave, je refuse d'être un maître. Telle est mon idée de la démocratie.
                                           Abraham Lincoln

Si derrière toute barbe il y avait de la sagesse, les chèvres seraient toutes prophètes.
                                          Proverbe arménien



Vidéos du jour (Incontournables)
Vidéo 1 :
 http://www.dailymotion.com/video/x8272c_tank-man-lhomme-de-tiananmen-5-juin_news
Vidéo 2 :
http://www.youtube.com/watch?v=0ryBUQ9miHg&feature=player_embedded

Passage du jour
Aucune image n’a capturé avec autant d’acuité l’esprit de notre mouvement, poursuit-elle. Qu’importe le nom derrière la silhouette. Qu’importe son âge, son sexe. Cette photo nous représente tous, avec nos mains nues et notre sincérité, notre résolution et notre pacifisme
                                     Chai Ling, l’une des chefs de fils du mouvement de
                                                                       1989, aujourd’hui installée aux USA
                        


Une chemise blanche, 2 sacs de supermarché.  Peu de traits suffisent à marquer la mémoire. A midi, ce 5 juin 1989, à Pékin, il se tenait debout, droit, survivant et insolent, paralysant par sa seule présence une colonne de blindés. Il escalada le premier char, dialogua avec le conducteur. Finalement, quelques badauds l’arrachèrent de sa position et de notre champ de vision.

Depuis le balcon d’un hôtel, 4 photojournalistes avaient eu le temps d'immortaliser la scène :

Arthur Tsang  de Reuters
http://www.nationalpost.com/news/1644351.bin?size=404x272

Charlie Cole de Newsweek
© 2000 Charlie Cole
©2000 Charlie Cole

 
Stuart Franklin de Magnum
http://2.bp.blogspot.com/_MuWNJtJ8XS4/SgtxbjWWdRI/AAAAAAAAEfA/1h0Y9FNHU4M/s400/Franklin.BS.Tianaman9.jpg


Jeff Widener d’Associated Press.

http://static.guim.co.uk/sys-images/Guardian/Pix/pictures/2008/06/04/tiananmen.jpg


Leurs images allaient faire le tour du monde et propulser l’homme de la place Tiananmen dans la postérité… Il s’était évaporé… mais il était partout.

L’homme de la place maîtrise à la fois l’espace de l’avenue de Chang’an et le temps. Le film dure 5 minutes alors que la photo, image immobile, évoque ce temps gelé par la force de l’homme. Le char ne passe pas. Il ne passera jamais. Tant que l’homme sera là, c’est-à-dire aussi longtemps que l’on regardera la photo, le char ne peut pas bouger. Il doit attendre. Attendre pour toujours. Et le char n’a jamais cessé d’attendre. Il est resté là figé, embaumé pour l’éternité sur l’avenue de la Longue-Paix.

Le film ou les photos moins connues de Stuart Franklin racontent cependant la suite : comment l’homme monte sur le char, s’adresse au conducteur, descend de la machine et refuse de la laisser repartir. Des passants jaillissent sur l’avenue et entraînent l’homme au loin. Le convoi continue son chemin. Sans se retourner, le matador quitte son arène. On ne le reverra jamais. Fut-il abattu froidement au coin d’une rue quelques secondes plus tard ? Il aurait alors suivi son destin «Sans mémoire ni réminiscence, il emprunte la voie sans retour : l’Homme de dos parvient à son terme. Homme prêt pour la mort.»

Qu’est devenu notre homme ?  Pour Charlie Cole, cela ne fait aucun doute : «Les types qui sont venus le chercher étaient des policiers et, vraisemblablement, ils ont dû l’abattre juste après. S’ils l’avaient gardé vivant, s’ils l’avaient rééduqué ou emprisonné, ils l’auraient montré en exemple à la télévision.» 


Cette image, par sa force, se rapproche de Tres de Mayo de Goya.
http://lh5.ggpht.com/_fYEIBs_5698/ScltTHO3ekI/AAAAAAAAATA/6Ej4Iqc6cxE/goya%20tres%20de%20mayo.jpg
La photo de Tiananmen est une vision d’après une révolution matée, elle fixe les derniers instants d’une révolte étouffée dans le sang. Comme le pékinois, la Madrilène fusillé par les Français écarte les bras et porte une chemise blanche, symbole de pureté. L’image nous prend à la gorge, Goya a choisi d’exposer le regard de l’homme qui s’apprête  à mourir face au peloton qui nous tourne le dos. Privées de visage, les militaires français qui criblent de balle le résistant espagnole sont renvoyés à leur inhumanité, rangés coude à coude, les épaules rentrées, ils deviennent une seule et même machine de guerre… une sorte de tank. Cependant, comme le 4 juin de Pékin n’est pas le 2 mai de Madrid, notre 5 juin n’est pas tout à fait le Tres de Mayo. Sur notre photo, c’est l’homme qui se tient de dos. La machine de guerre lui fait et nous fait face, nous sommes de son côté, derrière lui. Son dos, écran protecteur invincible, exprime toute son humanité, toute sa révolte et force.


 

Source : L'Homme de la place Tiananmen (Adrien Gombeaud)




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