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L’identité






Photos du jour












 

Jobless graduate David Rowe








Dis-moi comment tu désires et je te dirai qui tu es. 
                         Michel Foucault
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Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirais qui tu hais.
                         Francis Blanche
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La lecture doit être un danger
                              Cioran
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Quiconque aime une grenouille en fait une déesse 
                           Proverbe chinois  
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L'humanisme était une  façon d’éduquer, de discipliner, de «domestiquer» les gens. Aussi, les êtres humains, par nature inachevés, ont été domestiqués par la langue, la culture, la sédentarisation et le livre.
                            Peter Sloterdijk
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La lecture obligatoire  imposée dans le cadre scolaire est un frein et un obstacle. Elle n'est pas considérée comme une vraie lecture. Lire, c'est lire pour soi; la  lecture à l'école, c'est du travail, un travail comme un autre. [...] la lecture scolaire n'est ni suffisamment valorisée ni suffisamment appropriée pour devenir le socle d'une définition de soi comme lecteur.
                         Christian Baudelot
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Et puis, écrire une histoire est un geste qui accomplit la moitié du travail; l'autre moitié revient à cette personne qui prend cette histoire, la lit, l'emporte avec elle, la met près d'elle, dans la rue, au meilleur moment - le temps sauvé de la journée - et la fait passer dans son intimité.
                          Éric DE LUCA
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Qui vole une pièce d'argent se voit condamné; qui vole un État se voit couronné.
                          Proverbe chinois
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La bouse de vache est plus utile que les dogmes. On peut en faire de l'engrais.
                           Mao-Tsé-toung
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Si le ciel vous jette une datte, ouvrez la bouche.
                           Proverbe chinois
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Les interrogations du jour

Comment interpréter l'assertion suivante de Tzvetan Todorov: l'humain ne construit du sens qu'à partir de sa propre histoire?

On ne pense que par reflet, le chercheur en sciences humaines, comme l'écrivain n'analyse les faits qu'à partir de son vécu personnel. A la différence du chercheur en sciences naturelles, il doit abolir le mur entre sa vie et son ouvre. Il ne s'agit en aucun cas de céder aux mirages de l'introspection et de partir en quête d'un «moi» authentique. Il faut seulement considérer lucidement les rencontres qui nous façonnent : «Nous sommes entièrement faits des autres, de ce qu'ils nous ont donné, de leurs impressions, de leurs réactions. Le moi profond n'existe pas.»

Comment définir le mal selon Tzvetan Todorov?
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Je ne crois pas à un «mal» cosmique et invariable, mais il est vrai qu'on en retrouve les différentes formes à tout stade de l'histoire. Il provient de ce que chacun a besoin des autres, mais que ces autres ne lui accordent pas spontanément ce qu'il désire. Cet égocentrisme est particulièrement dangereux quand il devient collectif. Les pires forfaits ont été commis pour protéger les «nôtres» face à une menace venue d'ailleurs. Ce manichéisme, qui confond «nous et les autres» avec «ami et ennemi» ou pire, avec «bien et mal» est mortifère.
 
Quelle est la vision de Martin Heidegger par rapport au sens de la vie?
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La temporalité de l’homme c’est aussi sa tragédie : la mort est son destin. Comment vivre lorsque l’on se fait mortel et biodégradable. Redoutable problème existentiel. Pour Heidegger, la plupart des hommes se cachent à eux-mêmes cette vérité. Il s ont inventé tout un système de défense contre cette évidence. L’idée de l’au-delà à le grand avantage de proposer une option d’immortalité : c’est un peu notre joker métaphysique. Se laisser absorber par la quotidienneté de l’existence est une autre façon de détourner les yeux face à l’échéance suprême. Mais l’homme «authentique», selon Heidegger, est qui ose regarder sa propre mort en face, qui ose même l’anticiper. C’est à ce prix qu’il perd sa tranquillité d’esprit mais qu’il connaît la vrai prix de la vie et peut la vivre pleinement.
                         Jean-François Dortier, sociologue, fondateur du magazine  Sciences            
                                                                             Humaines.
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A partir de 1965, Roman Opalka peint sans relâche une suite de nombres, en partant du chiffre 1? En peignant ainsi, il se rend jusqu’à quel nombre?
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C'est en 1965 qu'Opalka met en chantier son œuvre intitulé Opalka 1965/1- . Il la poursuivra jusqu'à sa mort en 2011. Il peint en blanc sur fond noir les nombres qui se succèdent à l'infini. Chaque toile intitulé Détails est du même format - 1960 x 1350 cm. Arrivé au nombre 1 000 000, il ajoute 1% de blanc pour le fond de chaque tableau, se prend en photo et enregistre sa voix à la fin de chaque toile. L'œuvre s'achève au nombre 5 607 249. Dans cette œuvre moirée, entre chien et loup, résonne  l'une des tonalités de l'époque où le Nombre règne: celle d'un compte à rebours, d'une temporalité qui ne tient qu'à  un fil,  entre big-bang initial et holocauste final. Fusionnant l'un avec l'autre en un sens.
                                                  Mathieu  Terrence, auteur du livre, Le Devenir du  
                                                                    Nombre
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Un maitre de la musique qui a composé à l’aide des mathématiques…
C'est en 1954, avec l'œuvre Metastasis, que Iannis Xenakis crée une musique entièrement déduite de règles et de procédures mathématiques. Il ne possède pas encore la maitrise des ordinateurs qui systématiseront son processus créatif. Architecte de formation, élève de Le Corbusier, disciple de Boulez, il compose sa musique stochastique en s'appuyant sur la théorie des jeux de Van Neumann. Xenakis essaie de se rapprocher de la création de phénomènes biologiques. Pourtant la mélodie est désertée.
                                             Mathieu  Terrence, auteur du livre, Le Devenir du Nombre
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Liens en rapport avec la musique de Xenakis
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Lien 2 : https://www.youtube.com/watch?v=SZazYFchLRI                                                 





Article du jour

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Article se retrouvant dans le magazine La Recherche que j’ai trouvé très instructif… Le thème principal de cet article est l’identité. Vous pouvez trouvez ce numéro dans les kiosques à journaux ou le commander ici : http://www.larecherche.fr/boutique/parutions/2012

Les neurobiologistes ne cessent d'accumuler de nouvelles connaissances sur la mémoire. Elles les amènent à repenser la manière dont nous construisons nos souvenirs et notre identité. Ce numéro des Dossiers de La Recherche fait un point complet et actuel sur cette fonction si fondamentalement humaine.



Les subtils rouages de notre mémoire
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Chaque fois que nous nous remémorons un moment précis, nous en reconstruisons le souvenir. Nous combinons pour cela des connaissances schématiques sur notre passé et des détails spécifiques à cet événement.

Comment notre mémoire façonne-t-elle notre identité ? Philosophes et psychologues ont longtemps débattu de la nature de la conscience de soi et de sa relation avec la mémoire. Parmi eux, William James fut l’un des premiers, en 1980, à définir l’identité par ses liens avec la mémoire de sa propre histoire. Pour lui, sans cette capacité à remonter dans notre passé, nous ne pourrions simplement pas avoir d’identité. Aujourd’hui, on considère que c’est la mémoire autobiographique, celle des expériences et des connaissances personnelles acquises tout au long de sa vie, qui fond notre sentiment d’identité : ce que nous avons été, ce que nous sommes maintenant et que nous nous pourrions devenir. Cette mémoire est considérée comme un système mnésique uniquement humain.


Lorsqu’un  souvenir autobiographique nous vient à l’esprit, tout un réseau cérébral largement distribué dans le néocortex devient actif. Toute atteinte de ce réseau, en cas de lésions cérébrales, par exemple, s’accompagne donc logiquement d’une perturbation de nos souvenirs plus ou moins importante, voire d’une absence totale de souvenirs, mais aussi d’une perte d’identité. 30 ans de recherche dans ce domaine ont conduit à une conception théorique de ce système de mémoire de soi et à ses différentes propriétés.


Principes de cohérence et de correspondance 

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Tout d’abord, la mémoire autobiographique n’est pas forcément exacte. Les études cognitives montrent qu’un souvenir peut être exact, partiellement  exact, ou totalement faux. Il est toujours incomplet et fragmentaire, sans commune mesure avec d’autres formes d’enregistrements comme les vidéos, les photographies, etc. Comme l’ont montré de nombreux travaux, la mémoire humaine est axée bien plus sur l’extraction et la mémorisation du sens général que sur des détails.

Dans les années 1990, à partir de cas cliniques et de résultats d’expérience de psychologie  expérimentale, l’un d’entre nous (Martin Conway) a proposé une nouvelle conception de la mémoire autobiographique. Elle tranchait considérablement avec la vision précédente. On savait déjà que la mémoire autobiographique reposait sur 2 composantes, la mémoire épisodique, c’est-à-dire celle des événements, et la mémoire sémantique, plus conceptuelle, celle des connaissances générales sur le monde et sur soi.
Mais ce nouveau modèle a mis l’accent sur le fait que les souvenirs autobiographiques sont des reconstructions mentales complexes. Il stipule que la mémoire autobiographique est guidée par 2 principes complémentaires : celui de correspondance et celui de cohérence. Quand on reconstruit un souvenir, il doit refléter au mieux notre expérience de la réalité, c’est le principe de correspondance. Il doit aussi, selon le principe de correspondance, être en accord avec ce que nous sommes, c’est-à-dire toutes nos croyances et 
l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes.

Dans ce cadre théorique, chaque souvenir est le résultat d’un équilibre entre correspondance et cohérence, qui nourrit notre identité et permet de nous adapter au monde social. Trop de correspondance suscite l’émergence de souvenirs très détaillés et vivaces qui focalisent notre attention, et nos ressources cognitives et affectives.

A l’inverse, trop de cohérence peut conduire à construire un passé fantasque, et donc à une identité non fondée sur les expériences vécues, voire, à l’extrême, à une fausse identité. Les patients schizophrènes, par exemple, ont à la fois des souvenirs qui confirment  leurs délires (principe de cohérence) et des souvenirs qui contredisent leurs croyances (principe de correspondance).


Du souvenir à la connaissance



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L’idée que les souvenirs autobiographiques ne sont donc pas stockés comme tels en mémoire et sont des constructions mentales est désormais de plus en plus partagée. Le processus est complexe et dynamique. Ces souvenirs sont construits à chaque rappel à partir de plusieurs types d’informations gérées par différentes régions cérébrales. C’est de cette construction qu’émerge le sentiment conscient de revivre l’événement passé.

Mais, avant de décrire comment s’effectue ce processus de rappel, revenons sur la nature des différentes composantes sur lesquelles il s’appuie. Le fait de pouvoir se projeter dans le temps pour revivre un souvenir personnel spécifique est ce qu’Endel Tulving, de l’université de Toronto, a appelé la «conscience autonoétique» dans les années 1980. Pour lui, c’est la pierre angulaire de la mémoire épisodique.
Cette expérience contraste avec d’autres états de conscience tels que le sentiment de familiarité et de savoir, dits «conscience noétique», qui peuvent accompagner le rappel de connaissances autobiographiques sans souvenirs épisodiques associés. Et toujours selon Endel Tulving, ces 2 états de conscience, autonoétique et noétique, caractérisent respectivement le rappel en mémoire épisodique et en mémoire sémantique. Il a ainsi été le premier, en 1988, à distinguer les 2 types d’informations auxquels la mémoire autobiographique fait appel : les souvenirs épisodiques et les connaissances conceptuelles.

Les souvenirs épisodiques sont des représentations de moments spécifiques. Par exemple : je me souviens du jour de mon mariage. Ils contiennent toujours des détails épisodiques perceptifs et sensoriels, souvent des détails visuels. Ils présentent aussi toujours un point de vue; soit celui de «l’observateur», lorsque le sujet se voit lui-même dans son souvenir : je me vois petit aller à l’école; soit celui de «l’acteur», caractéristique des souvenirs épisodiques vivaces et détaillés, qui conserve le point de vue original de l’événement vécu : je revois mon maître me pointer du doigt en me menaçant de me punir.

Au cours des années 2000, nous avons montré que les connaissances conceptuelles, au contraire, sont constituées de schémas et de représentations  génériques. Les plus abstraits, les schémas, sont des idées générales sur nous-mêmes : je suis une personne persévérante, gourmande, etc. Les représentations génériques concernent de longues périodes bien définies, avec un début et une fin (quand  j’étais à l’université, quand je vivais à Paris, etc.) Elles sont reliées par thèmes de vie et non selon un ordre temporel.
Nous les appelons les «périodes de vie». Elles sont associées à un autre type de connaissances conceptuelles personnelles : «les événements généraux». Ce sont en quelque sort des résumés de nombreux événements spécifiques, soit étalés dans le temps (mes vacances en Italie), soit répétés (les week-ends pendant mon adolescence).  Ils ont perdu l’inscription contextuelle de chaque événement. Par souci d’économie, on en crée une  représentation schématique.

Au fil d’expériences similaires, on passe donc d’un souvenir épisodique à une connaissance conceptuelle. L’événement particulier n’est plus inscrit en tant que tel. C’est un processus de «sémantisation» : avec le temps, le sentiment de «se souvenir» devient celui de «savoir», et le point de vue d’observateur. Mais, malgré cette tendance à schématisation des souvenirs épisodiques, certains d’entre eux, souvent les plus marquants du point de vue personnel, conservent leur nature épisodique.
Revenons à ce qui se passe au moment du rappel du souvenir autobiographique. Comment se construit-il à partir des différents types d’informations épisodiques ou conceptuelles? Dans un certain contexte, un souvenir peut revenir en mémoire spontanément et involontairement. La madeleine de Proust en est l’exemple typique.

Mais il s’agit, la plupart du temps, d’un processus stratégique : une construction contrôlée par un administrateur une, une identité à un moment donné, nous privilégions l’accès à un souvenir plutôt qu’à un autre. Ainsi, c’est cette identité exécutive qui détermine quels souvenirs vont être rappelés. Ce processus peut donner accès à des connaissances sur une période de vie (quand j’étais professeur à l’université de Leeds), qui à leur tour convoquent des événements généraux (les congrès internationaux), qui eux-mêmes renvoient à des détails d’événements spécifiques (une rencontre marquante dans un congrès).
Le rôle de cette identité exécutive est particulièrement visible chez les personnes souffrant de dépression, qui ont ainsi bien plus de mal à se rappeler les souvenirs épisodiques positifs que négatifs. Plus généralement, on observe que, dans les maladies psychiatriques et neurologiques, la mémoire autobiographique est plus souvent affectée par une perte d’accès aux souvenirs épisodiques qu’aux connaissances conceptuelles. Ce résultat suggère que les 2 composantes de la mémoire autobiographique, même si elles sont étroitement liées, peuvent être dissociées au niveau cognitif.


Un réseau cérébral vaste et engagé 

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Le sont-elles au niveau cérébral? Pour le savoir, de nombreuses expériences d’imagerie fonctionnelle ont cherché à localiser les régions du cerveau activées lors de l’évocation de connaissances générales sur soi (goût, traits de personnalité, faits et événements généraux) et de souvenirs autobiographiques. Au cours de ces expériences, on demande aux sujets de se remémorer des faits passés à partir de mots, de phrases ou de photos. Elles montrent toutes que la mémoire autobiographique engage un réseau cérébral vaste. Préférentiellement latéralisé à gauche, il comprend les régions néocorticales frontales, et des régions plus postérieures. Ce réseau implique des structures cérébrales médianes que l’on associe en générale aux processus de référence à soi.

Afin de mieux cerner le réseau spécifiquement activé pour les souvenirs épisodiques, nous avons récemment mené une expérience en collaboration avec le centre de psychiatrie et neurosciences de l’université Paris-Descartes, à l’hôpital Sainte-Anne. Nous avons demandé à des jeunes adultes et à des adultes âgés de 65 à 80 ans de se rappeler des souvenirs ou des connaissances autobiographiques datant de plus de 5 ans. Les résultats d’imagerie fonctionnelle ont montré que le réseau cérébral activé spécifiquement lors de l’évocation de souvenirs notamment le cortex cingulaire antérieur, l’hippocampe, une zone du lobe pariétal, l’insula et le cuneus.

Interaction entre 2 régions du cerveau 
Grâce à certaines techniques, il est aussi possible de suivre la séquence d’activation dans le temps pour préciser comment les différentes régions se passent le relais et de la comparer au modèle cognitif. Au départ, pendant la reconstruction du souvenir (processus stratégique et accès aux connaissances conceptuelles), ce sont les régions préfrontales et temporales latérales qui sont sollicitées. Puis, après 10 à 20 secondes, c’est au tour de l’hippocampe et des régions postérieures d’être activés, au moment où la personne revit son souvenir. En comparant des mesures cérébrales sur le métabolisme de base réalisées lorsque la personne est au repos et les résultats des questionnaires cognitifs,  nous avons confirmé avec l’équipe de Francis Caen, ces correspondances spécifiques.
Ainsi, non seulement l’existence d’un réseau cérébral commun aux différentes composantes de la mémoire autobiographique a été montrée, mais aussi celle de régions spécifiques, confirmant l’idée d’une dissociation fonctionnelle entre les aspects épisodiques et conceptuels. Le système hippocampique et postérieur (pariétoccipital) serait toujours impliqué dans l’évocation de souvenirs épisodiques, plus ou moins anciens, alors que le système fronto-temporal latéral semble lié au  processus stratégiques et à l’accès aux connaissances conceptuelles.

Tous ces systèmes cérébraux propres à la mémoire autobiographique ont été mis en évidence chez des sujets sains. Des études de neuropsychologie chez des patients ayant des lésions cérébrales notamment des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de démence fronto-temporale, ont confirmé ces résultats. En effet, des lésions frontales ou temporales, des lésions postérieures ou des lésions au niveau des connexions entre ces régions affectent la mémoire autobiographique de ces patients.

L’ensemble de ces travaux, tant en neuropsychologie qu’en neuro-imagerie, plaide fortement en faveur de 2 systèmes distincts dans la mémoire autobiographique et l’expérience consciente, qui peuvent être dissociés dans la pathologie mais agissent de concert dans le fonctionnement normal. Ils soulignent aussi une certaine continuité entre les capacités de projection dans le temps subjectif, qu’il s’agisse du passé ou bien du futur, ce qui se réfère directement aux propriétés de la conscience autonétique, pierre angulaire de la mémoire épisodique.

Voyager mentalement dans le passé 

Cependant, nos résultats soulignent là encore que la construction de notre futur, de même que celle de notre passé, engage à foison des processus stratégiques et l’accès à des connaissances conceptuelles personnelles, à des représentations abstraites d’une identité possible, désirée, ou planifiée (ce que je pourrais être, aimerais être ou que j’ai décidé d’être). Et si les souvenirs épisodiques sont importants pour préserver une continuité entre passé, présent et futur et, probablement, pour entretenir notre capacité à revivre mentalement notre passée et pressentir notre futur, la plupart d’entre eux s’effacent dans la mémoire à long terme. En fait, peu de souvenirs épisodiques peuvent être rappelés au-delà d’une semaine.

Ainsi, aussi bien le passé que le futur sont principalement construits sur des connaissances autobiographiques, et non sur des souvenirs épisodiques sont certes rares, mais ils sont très précieux : ils nous permettent de ressentir qui nous avons été, qui nous sommes, qui nous serons et qui nous pourrions être.

Magazine du jour : 
 Les dossiers de La Recherche,
La Mémoire
 


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